Il est en vacances dans le chalet familial, mais il prend le temps. Patrick Curley, cofondateur et président-directeur général de Third Side Music, est à la tête d’une maison d’édition montréalaise devenue l’une des plus importantes du continent. Une entreprise qui fête ses 20 ans en 2025 avec fierté, sans compromis et qui demeure profondément indépendante.
Une indépendance à toute épreuve
« Être indépendant en 2025, ça veut dire être en compétition avec les plus gros acteurs du monde, sans vendre son âme », explique en riant Patrick Curley. Fondée à Montréal, Third Side Music est aujourd’hui un joueur mondial : plus de 25 millions de dollars de chiffre d’affaires annuel, des équipes à Los Angeles, New York, Londres, Mexico et une forte présence en Europe et aux États-Unis.
Mais la philosophie est restée intacte. « On n’a pas de capital institutionnel. Pas de fonds de pension. Pas de multinationales derrière nous. On fait nos choix artistiques. On mise sur des artistes qu’on aime et sur qui nous pouvons miser sur le long terme. »
La synchro comme cheval de bataille
C’est dans le domaine de la synchronisation – le placement musical en pub, en film, en télé ou en jeu vidéo – que Third Side Music s’est imposée. « Dès le départ, c’était notre force. On a bâti notre réputation là-dessus », dit-il.
Un exemple marquant? La chanson Jacuzzi de Radio Radio, utilisée dans une pub marquante des Canadiens de Montréal. « Ce placement-là a tout changé. Et il continue de générer des revenus », soulignant également que 35 % du chiffre d’affaires de l’entreprise vient de la synchro.
Et chaque membre de l’équipe joue un rôle actif dans la découverte et la mise en marché d’œuvres. « On est 35 dans l’équipe. Et chaque personne est d’abord un fan de musique. Ça change tout. »
Une croissance tranquille… mais solide
Le modèle Third Side Music repose sur une base simple mais exigeante : offrir un service humain, rigoureux et adapté. « Nos artistes sont souvent surpris de recevoir des relevés clairs, des chèques à temps et une vraie transparence”, ajoute l’entrepreneur. Patrick Curley mentionne avoir investi très tôt dans un système maison de gestion de droits. Résultat: en 20 ans, l’entreprise n’a jamais fait une erreur de paiement. Un chiffre témoigne d’ailleurs de cette fidélité : 99 % des artistes renouvellent leur contrat à échéance.
De Lisa LeBlanc à Quincy Jones
Le catalogue de Third Side Music est à l’image de son fondateur : éclectique, audacieux, mais cohérent. On y retrouve Lisa LeBlanc, Les Louanges, Claude Bégin, Random Recipe, mais aussi Run The Jewels, Flying Lotus ou encore le catalogue d’un certain Quincy Jones.
« Oui, on a la chance de gérer des œuvres de Quincy Jones. Et on a réussi à multiplier leurs revenus par cinq depuis. »
Et parfois, les paris les plus artistiques paient. Il cite le cas de Khaled, saxophoniste basé à Montréal, aujourd’hui compositeur en vue à Hollywood. « Au début, on ne savait pas quoi faire avec lui. Mais son talent était indéniable », dit-il. Patrick Curley parle de ses artistes avec une passion indéniable.

Le luxe de dire non
Ce qui distingue Third Side Music, c’est aussi sa capacité à résister aux modes. « Si tu vois une vague dans cette industrie, c’est qu’elle est déjà passée », dit Curley, un brin moqueur. « On signe des artistes quand on y croit, pas quand tout le monde les courtise. »
Cette liberté s’est bâtie sur un refus tenace des offres de rachats de l’entreprise par des compétiteurs… et des compromis. « On a été courtisés. Beaucoup. Mais on a tenu bon. »
Et après ?
Continuer à croître, mais à sa façon, voilà son objectif. « On prépare une ronde de financement pour faire des rachats de catalogues à long terme. Mais on veut que ça reste une boîte indépendante, viable, transmissible », souligne l’homme d’affaires, alors que la conversation s’achève. Autrement dit : l’entrepreneur veut continuer de jouer la third side de la musique, celle qu’on entend rarement… mais qui joue longtemps.Pour suivre les actualités de Third Side Music, cliquez ici.