La véritable menace est l’idée d’« être inutile »

William Gaboury, réalisateur et compositeur
William Gaboury
Crédit photo : Nick Segoÿa

Je voulais prendre le temps et partager avec vous mon point de vue sur cette nouvelle technologie d’intelligence artificielle qui se prépare. En fait, qui est déjà arrivée. Tout d’abord, nous devons comprendre que ce sujet est tendance et semble être partout et sur toutes les plateformes, ce qui peut sembler écrasant et apporter beaucoup d’inquiétude.

J’ai entendu quelques-uns de mes amis qui travaillent dans l’industrie (notamment dans la musique et le cinéma) exprimer de l’inquiétude quant à la pertinence de leur existence en tant qu’artistes maintenant que l’intelligence artificielle a fait son entrée dans le domaine artistique. Et c’est le principal problème à mon avis. Oui, certainement en l’espace de trois minutes, toute personne qui comprend comment se servir de cet outil et de ses paramètres pourrait « créer » – ou demander à l’outil de créer, devrais-je dire – n’importe quel morceau de musique qu’il souhaite et de n’importe quelle manière. Vous pourriez dire à l’A.I. de créer un album à partir de tous les succès d’Ozzy Osbourne joués par les Beatles. Cela pourrait être fait, oui.

Les gens semblent oublier une chose à propos de l’art en général, soit la joie de créer et la satisfaction que l’on en éprouve. Le plaisir vient de s’impliquer et de faire de l’art avec des personnes partageant les mêmes idées qui aiment aussi créer. Le plaisir ressenti à penser à la prochaine scène et de décider quelle lentille vous allez utiliser pour cette scène ou quel accord devriez-vous utiliser dans le couplet de la chanson que vous êtes en train de composer aux petites heures du matin. Ça, c’est la joie de créer. Inventer une machine qui crée de l’art automatiquement et sur commande et qui pourrait le faire en quantité infinie ne procure absolument aucune satisfaction aux artistes.

En comparaison à quelque chose d’un peu plus tangible, nous avons maintenant des usines gigantesques qui ne sont dédiées qu’à la fabrication du pain. Et Malgré tout, en 2023, nous avons encore des boulangers indépendants qui gagnent leur vie. Personnellement, je préfère acheter quelque chose de quelqu’un qui aime le créer, plutôt qu’un logiciel conçu pour réduire le rapport production/coût. Cependant, chacun a son opinion. Je vous invite à protester contre cela, si c’est ce que vous voulez faire. Je vous invite à l’utiliser, si vous le souhaitez. Utilisez-le bien, rentabilisez-le. Utilisez-le dans votre intérêt, en tant que créateur.

La véritable menace est l’idée d’« être inutile ». Le vrai danger c’est que les artistes commencent à penser que ce qu’ils font en tant que créateurs n’est plus pertinent. Que notre valeur pour la société est moindre. En tant que musicien moi-même, je peux vous dire que, malheureusement, les artistes peuvent s’invalider trop facilement. Le sujet de l’IA n’a pas à amener l’art dans un état apathique.

Rappelez-vous le plaisir que nous avons sur scène lorsque nous rassemblons des gens pour entendre le message que nous voulons partager. Nous créons de l’art parce que cela rend les gens heureux. Nous faisons de la musique parce qu’elle rend la réalité plus belle. Peut-être que certaines personnes ne se soucieront pas de savoir si la musique et les films sont créés automatiquement, ou peut-être le feront-ils. Mais ce n’est pas important pour le moment.

Je fais de la musique parce que c’est la chose que j’aime le plus faire et je sais que je suis doué pour ça. Et vous l’êtes très probablement aussi. Ne remettez pas en question votre art en raison de l’importance de cette nouvelle technologie dans le monde. Il y aura toujours de nouvelles technologies et de nouveaux outils créés à notre époque. Et il y aura toujours des gens prêts à débourser de l’argent pour un instrument de musique qui date des années 60. 

Il y a encore des films tournés sur pellicule. Sur la rue Broadway à Nashville, il y a encore de la musique jouée très fort jusqu’à 2 heures du matin. Les gens achètent encore de vraies peintures à l’huile. Et la dernière fois que j’y suis allé, le Philharmonic Hall de Manhattan était encore bondé quand l’orchestre jouait le Sacre du Printemps. Alors continuons à faire de l’art de la manière la plus esthétique possible et continuons de rendre ce monde un peu plus beau chaque jour.

Pour suivre les actualités de William Gaboury: www.williamgaboury.com

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