Le banal qui serre le cœur

Face à face avec Patrick Bourdon
Crédit : Steven Grondin

Il nous attendait sur le trottoir, café à la main, le regard brillant. Accompagné de notre photographe, j’arrive un peu en retard. Lui a fait la route de Montréal juste pour jaser. Ça dit tout : Patrick Bourdon est là pour parler vrai, de son art, de ses textes et de la scène. L’auteur-compositeur-interprète vient de dévoiler son nouvel album, BOURDON, un hymne au country sous toutes ses formes. Drôle, chaleureux, avec une “tchatche” qui rappelle Plume Latraverse, il déroule son parcours sans filtre.

Les débuts : la guitare comme moteur

« La guit’ a toujours été le moteur. En sixième année du primaire, j’écrivais déjà des tounes », mentionne l’auteur-compositeur-interprète originaire de Saint-Julie en Montérégie. Au cégep, il réalise surtout… qu’il n’est « pas un bon guitariste jazz ». Un mal pour un bien : ça le pousse à travailler plus fort, à se forger une discipline, à se trouver une gang et à se concentrer sur l’écriture. « C’est là que j’ai compris que j’étais meilleur pour raconter que pour faire des gammes », ajoute-t-il.

Bourdon
écrit comme il respire, à partir de ce qu’il observe. « Une anecdote d’épicerie peut devenir un portrait. Le plus banal, c’est souvent le plus universel. » Il aime transformer des scènes anodines en petits morceaux d’humanité. « Je pense qu’on passe à côté de beaucoup de beau, juste parce qu’on le trouve trop ordinaire », souligne l’artiste. Chez lui, la mélancolie et l’humour marchent main dans la main. Un mélange doux-amer qu’on retrouve dans chacune de ses chansons.

Crédit : Steven Grondin

D’abord le texte

Sur les réseaux, il se montre franc, un brin pince-sans-rire. « Qu’on le veuille ou non, ça devient un branding. Moi, j’ai juste décidé d’assumer qui je suis pour vrai », soulignant qu’il n’aime pas les façades ou le ton fabriqué. Il écrit comme il parle, tout simplement. « Je pars toujours du texte. Je ne sortirai jamais une toune dont je ne suis pas fier des paroles », mentionnant que le folk-country est devenu son terrain de jeu. C’est simple, direct, propice à la poésie. « J’aime ça quand la musique laisse respirer les mots. » 

Si certaines chansons font sourire, d’autres sont empreintes d’une évidente nostalgie. Une tristesse qui caractérise bien son écriture. « Je ne suis pas malheureux, mais oui, il y a une noirceur qui revient. Avant, je la camouflais derrière des jokes; aujourd’hui, j’enlève des couches. » Chez Patrick Bourdon, la lucidité est une manière d’être. « Quand l’angoisse cogne, certains vont courir. Moi, j’écris. »

L’inspiration

« Ça vient par flash. J’accumule, je note, et plus tard, je trime là-dedans comme dans une sculpture. » Pour lui, il est impossible de planifier l’inspiration. Il attend la pulsion, puis travaille jusqu’à ce que les mots trouvent leur place. Son processus est instinctif, ancré dans la vie de tous les jours. « Souvent, une toune part d’un détail, d’une phrase qui me revient, d’un feeling que j’arrive pas à tasser. » S’il a bien essayé de trouver un rythme à son écriture, de se discipliner et de se donner des périodes consacrées à jeter sur papier ce qui bouillonne dans sa tête, c’est toujours sur un élan (souvent inattendu) qu’il se met à jeter les bases d’une prochaine chanson.

Son regard sur l’industrie

Bourdon parle du métier sans amertume. Il adore la création, mais ne cache pas son indifférence pour le “show-business” qui vient avec la profession. Il s’autoproduit, s’occupe de son booking même s’il est à la recherche des bonnes personnes pour l’accompagner. « Je fais mes affaires, mais j’aimerais embarquer avec une équipe qui pousse dans la même direction. » Et l’industrie, il la regarde avec humour et recul. « C’est un drôle de milieu. Mais y’a encore du vrai monde là-dedans. »

Sur scène, il préfère la formule trio ou bluegrass : « Ça me laisse de la place pour m’amuser à la guitare. » L’année prochaine, il veut reprendre la route, jouer et peut-être enregistrer un nouveau projet « juste pour le fun ». Fait intéressant, Patrick Bourdon rêve aussi d’une collaboration avec Aswell ou Rau_Ze. Voilà deux univers que nous serions curieux de voir fusionner. « On se comprendrait, je pense. »

Patrick Bourdon a ce don rare de parler de la vie sans prétention, avec humour et justesse. Il tire du banal un petit quelque chose qui serre et nous rappelle qu’une chanson peut naître dans un détail, un regard, un samedi d’automne… ou autour d’un café.

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